Tout ce que vous voudriez savoir sur le syndrome du Covid-19 long

Depuis le début de la pandémie de Covid-19 qui sévit depuis plus d’une longue année, les connaissances  sur le SARS-CoV-2 se sont accumulées à une vitesse impressionnante. Mais le virus n’a pas encore livré tous ses secrets comme en témoigne la multiplication des crises sanitaires qui continuent à agiter la planète et à déstabiliser les systèmes de santé. Cependant, le nombre de patients « remis de l’infection » augmente, ce qui permet de mieux appréhender ses conséquences et ses complications à long terme. La Covid-19 qui fut initialement perçue comme une infection respiratoire virale revêt désormais le visage d’une maladie plurisystémique qui touche de nombreux organes vitaux -ou non- de manière durable dans certains cas. Le spectre de ses manifestations cliniques est large tant à la phase aiguë de la maladie que dans son décours au point que le syndrome du Covid long est de plus en plus reconnu, avec toujours des interrogations sur ses mécanismes et à sa prise en charge.

Revue exhaustive dans Nature Medicine

A l’instar des autres infections liées à certains membres de la famille des coronavirus (cf les épidémies pas si lointaines de SRAS en 2003 et de MERS [Middle East respiratory syndrome] en 2012), la Covid-19 peut avoir des répercussions persistantes ou décalées (> 4 semaines après les symptômes inauguraux) sur les structures et les fonctions de divers organes. Pour ceux qui veulent tout savoir sur les tenants et les aboutissants du syndrome du Covid long, il est recommandé de se plonger dans la lecture approfondie d’une revue exhaustive publiée en ligne le 22 mars dans Nature Medicine. Les auteurs ont passé en revue toute la littérature sur le sujet en insistant sur les mécanismes pathogéniques sous-jacents et les séquelles qui peuvent concerner de nombreux organes. Il est impossible de résumer cet article qui mérite cependant qu’on s’arrête sur ses points principaux pour inciter à identifier les patients les plus exposés à ce syndrome, dans un but de prévention dans des unités spécialisées.

Des patients à haut risque (mais pas toujours) et une grande diversité clinique

Les organes de prédilection quant aux séquelles possibles sont nombreux et les symptômes ou signes qui témoignent de leur atteinte sont d’un polymorphisme extrême : respiratoires, cardiovasculaires, rénaux, hématologiques, neuropsychiatriques, digestifs, dermatologiques, endocriniens etc. Sans omettre les formes multisystémiques pédiatriques qui peuvent avoir leurs séquelles propres. Il n’est pas d’ailleurs toujours évident de rattacher cette riche sémiologie notamment neuropsychiatrique à un substratum organique
.
Un tel polymorphisme clinique et fonctionnel appelle une approche multidisciplinaire qui est conditionnée par les ressources propres à chaque pays et doit viser les patients les plus à risque de complications sur la base des éléments suivants : forme aiguë sévère et/ou passage en unité de soins intensifs, âge avancé ainsi que comorbidités diverses (insuffisance respiratoire chronique préexistante, obésité, diabète, maladie cardiovasculaire, hypertension artérielle, insuffisance rénale chronique, antécédent de transplantation d’organe ou cancer évolutif) ou encore charge symptomatique lourde en termes d’intensité ou de diversité.

Cependant, force est de constater que le syndrome du Covid long ne concerne pas que ces profils à risque, et qu’il peut survenir, contrairement à toute attente, au terme de formes aiguës jugées à tort ou à raison comme légères ou modérées. Preuve que tout n’a été pas écrit sur ce sujet : d’ailleurs, de nombreuses études de recherche clinique sont actuellement en cours pour percer les mystères de certaines entités symptomatiques troublantes. Leur aboutissement pourrait être la mise en évidence de biomarqueurs capables de suivre l’histoire naturelle de la maladie et de ses diverses localisations potentielles, tout en conférant un substratum organique à certaines manifestations cliniques déroutantes.

De la nécessité d’une recherche clinique et d’une prise en charge pluridisciplinaires

Les études de cohorte prospectives et les essais cliniques en cours seront déterminants au même titre que la contribution de groupes de travail ou de groupes de soutien dédiés, autant de sources d’informations qui permettront de constituer des bases de données robustes et bien documentées. Les professionnels de santé sont appelés à jouer un rôle crucial dans cette démarche globale qui intègre certes les données cliniques, mais aussi divers examens complémentaires relevant de la biologie, de l’immunologie, de la génétique ou encore de l’imagerie non invasive. La prise en charge des patients victimes de la Covid-19 ne s’arrête pas à leur sortie de l’hôpital : elle s’avère déterminante dans les semaines qui suivent et son optimisation passe par une coopération interdisciplinaire au sein d’unités capables de fournir des soins intégrés et de répondre à une demande complexe et encore imparfaitement comprise. C’est à ce prix que la santé mentale et physique des patients sera au mieux préservée sur le long terme, ce qui suppose une connaissance approfondie de la maladie et de ses multiples facettes.

Compte tenu des  dimensions actuelles de la pandémie, la problématique risque fort de s’apparenter à un véritable défi et la lecture de cette revue à la fois exhaustive et  instructive suffit pour s’en convaincre. Les revues qui suivront dans les années à venir mériteront la plus grande attention car la mise à jour des connaissances permettra de résoudre peu à peu tous les mystères et les incertitudes pronostiques qui caractérisent encore le syndrome du Covid long.

Dr Philippe Tellier

Référence
Ani Nalbandian et coll. Post-acute COVID-19 syndrome. Nat Med 2021 ; publication avancée en ligne le 22 mars. doi: 10.1038/s41591-021-01283-z.

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Vos réactions (6)

  • De longues recommandations de la DGS

    Le 27 mars 2021

    Le syndrome du covid long n’étonne aucun généraliste, bien habitué à des tableaux viraux trainants (post grippaux saisonniers etc...) qu’il prend en charge de façon symptomatique et « holistique », ce qui l’étonne c’est la découverte de l’eau chaude.

    Il s’énerve quand il reçoit de longues recommandations de la DGS, affolée par la publication que vous citez, qui l’enjoint à traiter ses malades symptomatiquement et « parcimonieusement » (sic! ) en « plutidisciplinarité » dans des centres experts (qui n’existent pas). Il en a marre des affolés qui veulent lui apprendre son métier constamment en lui montrant une voie qui n’existe pas « on vous avait bien dit qu’il fallait faire comme ça! ». Il est perplexe en constatant que le morcellement de la réflexion médicale de certains les contraint à ne savoir prôner qu’une fantasmatique pluridisciplinarité qui ne reflète que l’absence d’esprit de synthèse et de vision globale. Le médecin généraliste est un grand garçon, il connaît son travail, il sait s’entourer des avis techniques utiles et des compétences qui lui échappent (quand il n’y en a plus de disponible, on lui demande de redevenir compétent - en obstétrique, en chirurgie, en psychiatrie-) .

    Il est donc étonné et irrité de voir se rejouer le Lyme chronique, mais bon, il va une fois de plus se servir de son bon sens. Le médecin généraliste emmerde la DGS. Et vice versa.

  • De longues recommandations de la DGS

    Le 27 mars 2021

    J'approuve totalement cette première réaction: les généralistes en ont marre d'être considérés comme des ' cancres ' qui ne savent rien et qui auraient tout à apprendre des ' autorités compétentes '.

    Dr Bernard Bidet

  • Encore un fourre-tout !

    Le 27 mars 2021

    "Il n’est pas d’ailleurs toujours évident de rattacher cette riche sémiologie notamment neuropsychiatrique à un substratum organique". Cet article aurait pu se résumer à cette phrase.

    Question : combien de Covid long sans Covid initial ? ;-)
    Tout cela rappelle tellement le "Lyme chronique"...

    Dr EG

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