
Paris, le lundi 13 décembre 2021 – Le dernier rapport de
l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) nous
éclaire sur un sujet peu connu, l’immigration pour raison
médicale.
Des immigrés médicaux venus essentiellement d’Afrique
Chaque année, l’Ofii adresse au Parlement un rapport, qui fait
généralement peu de bruit, sur la « Procédure pour admission au
séjour pour soins ». Selon le dernier rapport pour l’année
2020, 25 987 demandes d’immigration médicale ont été déposées l’an
dernier, soit une baisse de 11,6 % due en grande partie à la
pandémie de Covid-19. Environ deux tiers des dossiers font l’objet
d’un avis favorable de l’Ofii (soit environ 16 000 demandes), un
chiffre en augmentation. On ignore cependant combien de titres de
séjours pour raison médicale sont in fine délivrés par les préfets.
Pas d’indication précise non plus sur l’évolution de la demande
même si pour les médecins de l’Ofii « il y a, c’est évident, de
plus en plus une migration pour soins, la pression ayant épousé les
immenses besoins de santé des immigrés fraichement arrivés
».
Sans surprise, les demandeurs proviennent essentiellement de
pays africains pauvres : les Algériens sont les plus nombreux (10,4
%), suivi des Ivoiriens (6,8 %) et des Congolais (6,2 %). Le
rapport précise cependant que chaque année, une poignée d’habitants
de pays riches (canadiens, américains, japonais…) tentent de
bénéficier de la générosité de la France. Selon les fonctionnaires
de l’Ofii, l’immigration médicale sert souvent de seconde chance
aux déboutés du droit d’asile. La preuve en est, les Syriens et les
Afghans sont très peu nombreux parmi les immigrés médicaux, car
leur demande d’asile est généralement acceptée.
Sur le plan des pathologies concernées, les candidats à
l’immigration médicale souffrent le plus souvent de troubles
psychiatriques (26 900 personnes entre 2017 et 2020), d’un
infection à VIH (17 150) ou du diabète (16 927).
Une prise en charge totale au cout incertain
Les immigrés médicaux bénéficient de soins totalement
gratuits. Cette prise en charge est financée « par des
cotisations versées par les partenaires sociaux ou par l’impôt quel
que soit le coût » précise le rapport. Ce système ne doit pas
être confondu avec l’AME (Aide Médicale d’État), qui correspond à
la prise en charge des dépenses de santé des immigrés en situation
irrégulière.
Il n’existe aucune donnée sur le cout total de cette
immigration médicale et sur le montant moyen des dépenses de santé
d’un immigré pour raison médicale, mais il est probablement élevé,
puisque seules les personnes souffrant de pathologie lourde peuvent
en principe venir se faire soigner en France. Ainsi, 77 % des avis
favorables de l’Ofii concernent une prise en charge supérieure ou
égale à un an.
Dans son rapport, l’Ofii évoque deux points sur lesquels une
réflexion doit être menée pour rationaliser l’immigration médicale.
Tout d’abord, se pose la question de la prise en charge des
immigrés bénéficiant déjà d’un titre de séjour dans un pays
européen. Pour l’Ofii, il est discutable que des immigrés africains
résidant en Espagne ou en Italie par exemple (pays qui disposent
d’une médecine d’une qualité comparable à la nôtre) puissent venir
se faire soigner gratuitement en France. Autre sujet de réflexion,
celui de la prise en charge illimitée de thérapie innovante parfois
extrêmement couteuse. Le rapport cite notamment l’exemple d’un
immigré dont le traitement expérimental a couté plus de 420 000
euros à l’État. Le rapport préconise que lorsque le montant des
soins prévus dépasse un certain montant, la prise en charge du
patient immigré fasse l’objet d’une autorisation spéciale du
ministère de la Santé sur un budget défini préalablement.
Nicolas Barbet