
Absence de concertation
Ces différents textes portent les mêmes inquiétudes. D’abord, ils s’émeuvent du manque de concertation avec les premiers intéressés. Les Conseils nationaux professionnels de médecine physique et réadaptation, d’ophtalmologie et d’orl disent ainsi qu’ils « refusent qu’un bouleversement de cette importance soit imposé sans concertation préalable entre les parties prenantes, sans prendre l’avis de l’Académie Nationale de Médecine, du Conseil National de l’Ordre des Médecins et sans évaluation par la HAS ».Perte de chance
Autre point de convergence : le rappel de la mission première de diagnostic des médecins, qui paraît totalement oubliée par les expérimentations de transferts de compétence proposées. Dans leur lettre à Catherine Deroche, citée par le Quotidien du médecin, les syndicats et l’Ordre disent ainsi redouter une médecine « déconnectée de tout diagnostic médical et de toute stratégie thérapeutique globale ». La crainte d’une perte de chance associée à cette évolution est clairement exprimée. L’autre conséquence néfaste mise en avant est le risque d’une désaffection pour de nombreuses spécialités.Zizanie
Ces médecins ne manquent pas par ailleurs de reprocher une certaine hypocrisie au gouvernement qui met en avant les déserts médicaux pour justifier les mesures qu’il défend. Les représentants des ophtalmologistes, des ORL et des spécialistes de médecine physique et de rééducation se moquent ainsi de « l’alibi avancé par le ministère d’un accès aux soins facilité dans les déserts médicaux, chacun sachant qu’orthoptistes, orthophonistes et kinésithérapeutes n’y sont pas mieux représentés que les professions médicales. Il faut un plan coordonné médecins-paramédicaux ambitieux pour y faire face » martèlent-ils. Peu rassurés par les prétendus “gardes fous” aménagés par les parlementaires (« En quoi l’appartenance du professionnel de santé à une CPTS résout-elle la question de la perte de chance du patient », écrivent l’Ordre et les syndicats), ces médecins déplorent encore des mesures qui font fi du parcours de soins et de la coordination avec les professionnels paramédicaux. « Cette réforme (…) sème la zizanie et casse le lien entre des médecins et des paramédicaux qui travaillaient jusque-là en harmonie dans l’intérêt des patients et qui seront demain mis en compétition, voire en conflit » écrivent les Conseils nationaux professionnels de médecine physique et réadaptation, d’ophtalmologie et d’orl qui s’inquiètent encore de la question de la responsabilité légale des paramédicaux.De l’autre côté du miroir
Cette sollicitude affichée vis-à-vis des infirmières, orthoptistes et kinésithérapeutes pourraient ne pas complètement convaincre ces derniers. A la différence des médecins, beaucoup dans leurs rangs se félicitent en effet de voir certaines de leurs revendications prendre corps, même s’ils s’interrogent quant aux répercussions financières.Aurélie Haroche