Une nouvelle voie thérapeutique dans la mucoviscidose

Schématiquement deux axes thérapeutiques ont été explorés dans la mucoviscidose.

Le premier, exploré depuis des décennies, non sans succès, consiste à lutter contre les complications de la maladie. C’est ainsi que grâce à la prise en charge quotidienne des infections et de l’insuffisance respiratoire et des manifestations digestives et endocriniennes de l’affection, la médiane de survie des patients dépasse actuellement 35 ans contre 5 ans dans les années 60. 

Le second consisterait à corriger le défaut génétique à l’origine de la maladie par thérapie génique. On sait en effet depuis 1989 que la mucoviscidose est due à une mutation transmise de façon autosomique récessive sur le gène codant pour la protéine CFTR (pour Cystic Fibrosis Transmembrane Regulator). Plus de 1 000 mutations ont été décrites jusqu’ici, la plus commune (70 % des cas) étant la deltaF508.   Un CFTR déficient ou absent entraîne des anomalies des flux transmembranaires épithéliaux qui expliquent les signes de la maladie et notamment les sécrétions muqueuses visqueuses. La thérapie génique n’a malheureusement pas pu encore aboutir à des résultats cliniques.

Un troisième axe de recherche existe. Il consiste à s’attaquer non plus, en amont, au gène lui-même ou, en aval, aux conséquences cliniques de l’affection, mais à la fonction du CFTR.

Un médicament conçu pour potentialiser l’action du CFTR défectueux

C’est sur cette voie qu’un succès peut-être décisif vient d’être accompli. Les équipes de Vertex Pharmaceuticals se sont focalisées sur une mutation rare (4 à 5 % des allèles) du gène CFTR, la G551D qui se caractérise par une substitution de l’aspartate par la glycine en position 551. Les porteurs de la G551D ont à la surface des cellules épithéliales une CFTR, présente, mais défectueuse. Grâce à l’ingénierie chimique et à un screening très large, les chercheurs de Vertex ont pu développer une molécule active per os et potentialisant les effets de la CFTR des porteurs de G551D. Ce candidat médicament, qui répond pour l’instant au nom de VX-770, après avoir été étudié in vitro, vient d’être testé avec succès chez l’homme.

Une amélioration clinique significative

L’équipe américaine de Franck Accurso a évalué contre placebo, durant 2 à 4 semaines, les effets de différentes doses de VX-770 chez 39 adultes atteints de mucoviscidose liée à une mutation G551D.

L’activité CFTR, évaluée par mesure de la différence de potentiel électrique à travers l’épithélium nasal et par étude de la concentration en chlorure de la sueur, est apparue comme partiellement corrigée par le VX-770 (plus nettement pour la fonction sudorale). Il faut noter toutefois que l’amélioration n’a été significative que pour les comparaisons intra-individuelles et non pour les comparaisons entre sujets sous traitement actif et sous placebo. De façon plus surprenante (ces patients ayant une maladie pulmonaire installée de longue date) le VX-770 a également amélioré en quelques jours la fonction respiratoire de façon modeste mais significative : VEMS augmenté de 8,7 % (p=0,008).

Les effets secondaires (une réaction allergique et des déséquilibrations d’un diabète préexistant) n’ont pas nécessité l’arrêt du traitement.

Nous n’en sommes bien sûr qu’à la première étape de ce qui pourrait être un progrès majeur dans la prise en charge de la mucoviscidose.

Il faudra naturellement confirmer ces résultats sur une plus longue période et mieux connaître la tolérance de ce nouveau médicament. Si les résultats étaient positifs, on pourrait alors envisager son utilisation à un stade précoce de la maladie avant que les lésions pulmonaires ne deviennent irréversibles.

Au-delà des rares patients porteurs de la mutation G551D, il est possible que ce produit puisse être utile chez les malades atteint d’autres mutations et notamment de la deltaF508 puisque in vitro il augmente l’activité de la protéine CFTR mutée lorsque celle-ci parvient à la surface cellulaire.

Enfin, à moyen terme on peut envisager la mise au point par des méthodes proches de « correcteurs » de la CFTR- deltaF508 et à long terme de potentialisateurs ou de correcteurs d’autres protéines mutées dans d’autres pathologies génétiques.

Dr Anastasia Roublev

Références
Accurso F et coll. : Effect of VX-770 in persons with cystic fibrosis and the G551D-CFTR mutation. N Engl J Med 2010; 363: 1991-2003.

Welsh M : Targeting the basic defect in cystic fibrosis. N Engl J Med 2010; 363: 2056-2057.

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