Vaccination des enfants de 2 ans en France, beaucoup de trous dans la couverture !

Certains parents conçoivent des réticences vis-à-vis des vaccinations pour leurs enfants, ce qui est à l’origine de couvertures vaccinales incomplètes dans les pays développés. Un tiers à la moitié des enfants de 2 à 6 ans échappent en partie ou totalement aux vaccins. Ainsi, rougeole et coqueluche persistent de façon sporadique et 25 % des décès et séquelles chez les enfants sont liées à des infections à pneumocoques et méningocoques évitables. Les facteurs favorisant une couverture incomplète sont multiples, données sociodémographiques, méconnaissance des parents qui croient que la maladie naturelle est préférable à la vaccination, fausses contre-indications, organisation du système de santé. La France est une bonne illustration des insuffisances en matière de vaccinations qui suscitent toujours beaucoup de doute.

Des chercheurs de l’INSERM ont étudié la couverture vaccinale des enfants de 2 ans grâce à une grande cohorte prospective suivie depuis la naissance (Etude Longitudinale Française depuis l’Enfance). L’étude avait pour but de suivre les sujets de la naissance à l’âge adulte sur la santé, les données sociodémographiques et les conduites. Au départ, 18 329 enfants nés en 2011 ont été recrutés dans 320 maternités. L’échantillonnage a tenu compte de la taille des services et les données ont été recueillies sur des périodes de 4 à 8 jours réparties dans l’année. Les patients inclus étaient des nouveau-nés singletons ou jumeaux, de terme ≥ 33 SA, nés de mères ≥ 18 ans, capables de fournir un consentement éclairé. Au début de l’étude, seuls les vaccins DTpolio étaient obligatoires et le MenC a été introduit dans le calendrier vaccinal en 2010. Les vaccins contre 11 agents pathogènes étaient recommandés avant l’âge de 2 ans et les enfants devaient avoir reçu 4 doses de DTpolio, 4 de vaccin coqueluche acellulaire, 4 doses anti-Haemophilus b (HiB), 3 de vaccin hépatite B (HepB), 2 de vaccin rougeole, oreillons, rubéole (ROR) et de MenC.

Des facteurs sociodémographiques mais pas seulement

Parmi les 18 329 enfants inclus initialement, les cas de 5 740 (31,3 %) ont pu être analysés. Ils différaient des non analysés (n = 11 844) par la moindre fréquence de prématurés, les mères étaient plus souvent nées en France, avaient plus souvent un niveau universitaire, des revenus plus élevés et résidaient plus fréquemment en zone suburbaine. Sur ces 5 740 enfants, 46,5 % (intervalle de confiance à 95 % IC 44,7-48) n’avaient pas un programme de vaccination complet avec au moins une 1 dose manquante des vaccins recommandés et 0,4 % (IC 0,2-0,7) n’avaient pas reçu une seule dose. Le taux de couverture vaccinale était pour la seconde dose de ROR de 82,6 % (IC 81,2-84), de 71,1 % (IC 69,4-73) pour le MenC, de 89,6 % (87,4-90) pour le HepB. Parmi les 2 550 enfants incomplètement vaccinés, il manquait une dose pour 46 % (n = 1174), 2 à 5 doses pour 43,6 % (n = 1 111) et même 6 et plus pour 10,4 % (n = 265). Les facteurs indépendamment associés aux vaccinations incomplètes étaient la présence d’une fratrie plus âgée : un enfant aOR (Odds ratio ajusté) 1,18 (1,03-1,34) et ≥ 2 aOR 1,28 (1,06-1,54), une résidence dans un lieu isolé aOR 1,92 (1,36-2,75), des parents ne suivant pas les recommandations de santé aOR 1,81 (1,41-2,34) ou adeptes de médecines alternatives aOR 1,23, (1,04-1,46), n’ayant pas eu de consultation dans un service de PMI pendant les 2 premiers mois aOR 1,19, (1,03-1,38) et le suivi par un généraliste vs un pédiatre aOR 2,87 (2,52-3,25)

Ainsi, cette enquête de l’INSERM montre combien les vaccinations incomplètes sont fréquentes et sont associées à des caractéristiques sociodémographiques, parentales et d’offres de soins.

Pr Jean Jacques Baudon

Référence
Jacques M et coll. : Determinants of incomplete vaccination in children at age two in France: results from the nationwide ELFE birth cohort. Eur J Pediatr., 2023;182:1019-1028.

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