
Chaque année, aux États-Unis comme dans d’autres pays occidentaux, des millions de jeunes enfants sont vaccinés en toute sécurité contre diverses maladies infectieuses potentiellement associées à une morbi-mortalité sinon élevée, du moins significative sur le plan clinique, épidémiologique ou encore économique. Le Comité consultatif sur les pratiques vaccinales (Advisory Committee on Immunization Practices) recommande une vaccination systématique contre 14 maladies au cours des 24 premiers mois de la vie. Quel est l’écho de ces recommandations au sein de la population générale ? Leur perception a-t-elle changé par rapport à la période qui a précédé la pandémie de Covid-19 ? Quels sont les facteurs susceptibles d’influer sur le recours à la vaccination sur le terrain ?
C’est à ces questions que répond une enquête nationale spécifique dite NIS-Child dans laquelle ont été inclus des enfants âgés de 19 à 35 mois. Les parents ou les tuteurs choisis au hasard ont d’abord répondu par téléphone à un questionnaire. Ce n’est qu’avec leur consentement que les divers prestataires du système de soins ont été contactés par courrier pour disposer du schéma vaccinal complet des participants. Les enfants nés au cours de l'année 2018-2019 ont été identifiés à partir des données collectées au cours de l'année 2019-2021, ce qui a permis de constituer une cohorte de 29 598 participants. Le taux de réponse des ménages en 2021 a été de 22,9 %, et les données adéquates sur les prestataires ont été obtenues dans un peu plus de la moitié des cas (51,5 %).
Influence du statut socio-économique…et de la pandémie
Par rapport aux enfants nés en 2016-2017, la couverture vaccinale des enfants nés en 2018-2019 a augmenté pour une majorité des vaccins recommandés. La couverture était >90 % pour ≥ 3 doses de vaccin contre le poliovirus (93,4 %), ≥ 3 doses de vaccin contre l'hépatite B (92,7 %), ≥ 1 dose de vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR) (91,6 %) et ≥ 1 dose de vaccin contre la varicelle (91,1 %). La couverture vaccinale était plus faible pour ≥ 2 doses de vaccin contre l'hépatite A (47,3 %). Globalement, pour l’ensemble des vaccins, elle s’est avérée similaire ou supérieure chez les enfants atteignant l'âge de 24 mois au cours du mois de mars 2020 ou plus tard (pendant la pandémie de COVID-19), comparativement à qui ont atteint cet âge avant mars 2020 (prépandémie).
Cependant, ces chiffres moyens qui semblent rassurant cachent de grandes disparités dans le temps et l’espace : chez les enfants vivant sous le seuil fédéral de pauvreté ou dans les zones rurales, la couverture vaccinale a diminué de 4 à 5 points de pourcentage pendant la pandémie. L’origine ethnique, le lieu de résidence, le statut socio-économique sont autant de variables qui influent considérablement sur la couverture vaccinale des enfants nés en 2018-2019, indépendamment du type d’assurance-maladie.
Le programme spécifique « vaccination pour les enfants » mérite d’être pleinement mis en œuvre pour corriger les inégalités actuelles, ce qui suppose d’évoquer le sujet lors de chaque consultation pédiatrique. La lutte contre le scepticisme vaccinal qui est toujours vivace dans de nombreux pays passe par ce type de démarche.
Dr Philippe Tellier