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Le CMG repart à la chasse au crocodile violet

Paris – C’est bientôt la rentrée et nombreux seront ceux qui en profiteront pour se remettre au sport. Et dans notre pays amoureux d’attestations, sport rime souvent avec certificat médical. Mais si un de vos patients se rend en ce mois de septembre chez vous pour obtenir un certificat d’aptitude à la pétanque ou un autre document du même acabit, qu’il ne soit pas étonné s’il appose sur le certificat un tampon illustré d’un crocodile violet. Ce sera pour vous une manière polie de lui signifier que vous avez autre chose à faire que de remplir ce genre de certificat absurde.

Le Collège de médecine générale (CMG) a en effet annoncé lancer ce lundi son opération « Septembre violet » pour sensibiliser les médecins, les patients et les autorités à la problématique des certificats médicaux absurdes, dénoncée depuis plusieurs décennies comme chronophages par les syndicats. Comme lors de la précédente campagne, qui avait été mené en avril 2023, l’opération a pour emblème le crocodile violet.

Aux Pays-Bas, l’expression crocodile violet (« paarse krokodil ») désigne en effet une bureaucratie inutile. L’expression provient d’une publicité diffusée en 2005, dans laquelle on demandait à une femme de remplir un formulaire pour récupérer une bouée violette en forme de crocodile.

Le sport et l’école, terrains de jeu favori du crocodile violet

Dans son communiqué, le CMG liste les principales sources de ces certificats inutiles et chronophages. Les premiers responsables sont les compagnies d’assurance qui « réclament régulièrement des informations médicales détaillées pour invalidité » à travers des « certificats illégaux ». Le sport est également un domaine privilégié pour les certificats inutiles en tout genre. Nombreux sont les clubs de sport qui dépassent les recommandations de leur fédération en demandant des certificats même quand ils ne sont pas exigés par la loi ou le règlement. L’école et plus globalement tous les lieux accueillant les enfants sont également source d’appel à des certificats sans intérêt et sans aucune valeur médicale ajoutée. 

« Aujourd’hui chacun peut réclamer un certificat médical pour trancher une situation qui semble vaguement en lien avec la santé : certificat pour changer une douche dans un logement social, pour avoir une clé de casier au collège, pour choisir le liniment en crèche… » s’exaspère le CMG. « Il est demandé qu’un certificat qui n’a pas un fondement dans un texte réglementaire ou législatif ne puisse plus être réclamé » poursuit le CMG, qui propose notamment aux mairies et aux rectorats d’agir en ce sens.

La méconnaissance ou la violation des textes réglementaires est donc la principale source de certificats inutiles. Mais au-delà, les généralistes demandent que certaines règles qu’ils jugent inutiles soit changées. Ils dénoncent notamment la création en 2021 d’un « certificat de non-contre-indication à l’accueil en collectivité », désormais exigé à l’entrée en crèche. 

Le ministre victime du crocodile violet

Le CMG va plus loin en estimant que certaines prescriptions peu médicales pourraient être délégués, comme celle de transports sanitaires (« une tâche purement administrative qui pourrait être entièrement déléguée à un personnel administratif » selon le communiqué) ou de certains matériels médicaux. Enfin, le CMG considère que, pour les arrêts de maladie de courte durée ou les congés pour enfant malade, le certificat médical pourrait être remplacé par une attestation sur l’honneur du salarié, comme c’est le cas dans plusieurs pays européens. La Cour des Comptes avait formulé une proposition en ce sens en mai dernier.

Selon le CMG, réduire le nombre de ces certificats médicaux inutiles aurait de multiples vertus. Cela permettrait bien sûr en premier lieu de donner plus de temps médical aux médecins pour se consacrer davantage « aux vrais problèmes du patient ». Le recul de la bureaucratie diminuera également le recours aux médecins, ce qui permettra de libérer davantage de créneaux de rendez-vous, une aubaine dans un contexte de pénurie médicale.

Le CMG met également en avant le coût économique de ces certificats absurdes : supprimer une consultation inutile par jour par médecin généraliste, c’est faire économiser un million d’euros à l’Assurance Maladie selon ses calculs. Plus globalement, mettre fin à ce travail inutile et rébarbatif « améliorerait le sens donné au métier », notamment pour les plus jeunes qui sont « témoins de cette absurdité administrative et de la solitude des médecins généralistes face à celle-ci ».

En février 2023, l’éphémère ministre de la Santé François Braun avait présenté son plan anti-paperasserie qui comportait un volet consacré aux certificats inutiles. Il avait notamment promis que les règles en vigueur concernant les certificats seraient rappelées aux administrations et aux fédérations sportives. Mais aucune mesure concrète n’avait finalement été prise et le Dr Braun a depuis été mangé par le crocodile violet.

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