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Dépistage du cancer prostatique : l’IRM au secours du PSA ?

Il fut un temps où le dosage systématique du PSA (Prostate Specific Antigen) était largement préconisé pour dépister le plus tôt possible le cancer prostatique qui est le plus fréquent des cancers chez l’homme. 

Trop de surdiagnostics

Cette attitude a été quelque peu battue en brèche par le taux élevé de surdiagnostics conduisant à des traitements délabrants et inadaptés, tout autant qu’à nombre de biopsies prostatiques tout aussi inutiles. Le recours à l’IRM multiparamétrique a permis, dans une certaine mesure, de corriger le tir, en limitant les indications de la biopsie prostatique. Cette imagerie n’en a pas moins ses limites et ses résultats peuvent être faussement négatifs, un cancer localement avancé (≥ grade 2 de l’International Society of Urological Pathology, ISUP) étant révélé par la biopsie dans 19 % à 28 % des cas. Autrement dit, les faux-positifs du PSA seraient transformés en faux-négatifs de l’IRM, ce qui n’est pas entièrement satisfaisant à l’aune du rapport coût-efficacité d’une stratégie diagnostique, quelle qu’elle soit. Cela étant, la négativité de l’IRM pourrait témoigner de formes peu évolutives de la maladie, une surveillance par l’imagerie permettant de détecter sa progression et d’intervenir à un moment où celle-ci prend des proportions inquiétantes. 

L’essai randomisé suédois dit GOTEBORG-2

Cette hypothèse est confrontée à l’actualisation des résultats à long terme de l’essai randomisé  GOTEBORG-2 (1) dont l’objectif était justement d’apprécier la validité d’une approche diagnostique basée sur la positivité de l’IRM pour guider sélectivement les indications d’une biopsie prostatique ciblée. Le critère de jugement primaire a été définis par la détection de cancers cliniquement non significatifs (grade 1 de la classification ISUP). La détection de cancers cliniquement significatifs (ISUP grade ≥2) a constitué, pour sa part, un critère secondaire, les lésions de plus haut grade (métastatiques ou ISUP grade 4 ou 5) étant également prises en compte. 

L’essai randomisé, débuté en 2015, a porté sur des participants âgés de 50 à 60 ans, chez lesquels le dosage du PSA a été proposé à des fins de dépistage du cancer prostatique. Des taux sériques de PSA ≥3 ng/ml ont conduit à la réalisation d’une IRM. Deux groupes ont été constitués par tirage au sort : (1) biopsie prostatique systématique ; (2) biopsie ciblée guidée par l’IRM. Cette stratégie s’est appliquée sur le long terme, respectivement 2, 4 ou 8 ans après l’inclusion dans l’essai, en fonction des taux sériques de PSA.

La fréquence des surdiagnostics divisée par plus de deux

Au terme d’un suivi médian de 3,9 années (environ 26 000 sujets-années dans chaque groupe), un cancer prostatique a été détecté chez 185 des 6 575 participants du groupe biopsie ciblée (2,8 %) versus 298/6578 (4,5 %) dans le groupe biopsie systématique. Le risque de détecter un cancer cliniquement non significatif a été divisé par plus de deux en cas de biopsie ciblée, le RR (risque relatif) étant en effet estimé à 0,43 (IC 95 %, 0,32 à 0,57 ; p<0,001), lors du dépistage inaugural. Le RR diminue par la suite, lors des dépistages successifs, sa valeur étant alors estimée à 0,25. 

Pour ce qui est des cancers cliniquement significatifs, la comparaison intergroupe a permis d’estimer le RR à 0,84 (IC 95 %, 0,66 à 1,07) : autrement dit, le risque de passer à côté de tels cancers en recourant au filtre de l’IRM s’est avéré très faible (quoique non nul) et il en a été de même pour le nombre de cancers localement avancés ou considérés comme à haut risque (soit 15 dans le groupe IRM versus 23 dans l’autre groupe, soit un RR de 0,65 (IC 95 %, 0,34 à 1,24). Le nombre des évènements indésirables sérieux s’est avéré voisin dans les deux groupes (3 dans le groupe biopsie systématique versus 2 dans l’autre groupe). 

Vers un recours systématique à l’IRM pour guider la biopsie ciblée ? 

Cet essai randomisé plaide en faveur du recours à l’IRM face à une augmentation significative du taux de PSA chez des sujets âgés de 50 à 60 ans, candidats à un dépistage du cancer prostatique. La pratique d’une biopsie ciblée uniquement en cas d’IRM anormale divise par plus de deux le risque de détecter un cancer prostatique cliniquement non significatif. Parallèlement, le risque de négliger un cancer incurable (ou un cancer de l’intervalle) apparaît très faible. 

La réduction des surdiagnostics par le biais d’une surveillance basée sur l’IRM, sans dommages collatéraux, est atteinte dans cet essai randomisé suédois. Il reste à évaluer cette stratégie dans le monde réel avant de l’adopter sans autre forme de procès. Le rapport coût-efficacité d’une stratégie reposant sur l’IRM pour guider une biopsie ciblée semble, en tout cas, supérieur à celui de la biopsie prostatique systématique, imposée par un taux de PSA ≥3 ng/ml, comme le souligne l’éditorialiste qui commente les résultats de l’essai GOTEBORG-2 (2). La stratégie mise en avant par ce dernier semble donc avoir de l’avenir sous réserve de coordonner les actions des divers intervenants à un échelon régional, à la lueur des recommandations mises à jour. 


References

(1)    Hugosson J, Godtman RA, Wallstrom J, Axcrona U, Bergh A, Egevad L, Geterud K, Khatami A, Socratous A, Spyratou V, Svensson L, Stranne J, Månsson M, Hellstrom M. Results after Four Years of Screening for Prostate Cancer with PSA and MRI. N Engl J Med. 2024 Sep 26;391(12):1083-1095. doi: 10.1056/NEJMoa2406050.
(2)    Pinsky PF. Prostate Biopsy in Men with an Elevated PSA Level - Reducing Overdiagnosis. N Engl J Med. 2024 Sep 26;391(12):1153-1154. doi: 10.1056/NEJMe2409985.
 


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