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La dissolution est-elle bonne pour la santé ?

Paris – La dissolution de l’Assemblée Nationale et la convocation de nouvelles élections législatives dans trois semaines pourraient avoir des conséquences majeures sur la politique de santé en France.

Coup de tonnerre dans un ciel (pas si) serein : hier soir, lors d’une allocution télévisée surprise, le Président de la République Emmanuel Macron a annoncé dissoudre l’Assemblée Nationale (une première depuis 1997) et convoquer des élections législatives anticipées, qui auront lieu les 30 juin et 7 juillet prochain. Le chef de l’Etat a pris cette décision politique majeure à la vue du résultat médiocre de la liste de son parti Renaissance aux élections européennes, qui n’a obtenu que 14,6 % des voix ce dimanche, très loin derrière la liste du Rassemblement National (RN) qui caracole en tête avec 31,4 % des suffrages.

La dissolution de l’Assemblée Nationale a pour première conséquence d’interrompre les travaux de la législature actuelle, élue il y a seulement deux ans. C’est notamment l’examen du projet de loi sur la fin de vie, visant à légaliser le suicide assisté et l’euthanasie et qui devait constituer la grande loi sociétale du second quinquennat d’Emmanuel Macron, qui prend fin. Les députés débattaient de ce texte extrêmement clivant d’un point de vue éthique et philosophie depuis le 27 mai dernier. 

Jeudi dernier, les députés avaient adopté l’article 5 du projet de loi définissant l’aide à mourir, après l’avoir amendé pour en retirer la possibilité qu’un proche non-professionnel de santé puisse administrer la substance létale à la demande du patient mourant. Les parlementaires ont ensuite longuement débattu, jeudi et vendredi, de l’article 6 du projet de loi définissant les conditions permettant de pouvoir bénéficier d’une aide à mourir. 

Le projet de loi sur la fin de vie mis à mort

Ils ont notamment réintroduit la notion de « pronostic vital », qui avait été retirée du projet de loi initial en commission, mais ont refusé de rétablir la notion de « court ou moyen terme », jugeant que les médecins n’étaient pas capables de prédire précisément le temps restant à vivre à un patient. Ils ont également amendé le texte pour que les patients rencontrant des « souffrances psychologiques » et non seulement physiques puissent bénéficier d’une aide au suicide. Les parlementaires ont en revanche rejeté tous les amendements visant à permettre que les patients puissent demander à bénéficier d’une aide à mourir dans leurs directives anticipées.

Les députés ont finalement adopté cette version remaniée de l’article 6 vendredi soir, par 51 voix pour et 24 contre, promettant de se retrouver dès lundi pour commencer l’examen des articles 7 à 15 du projet de loi relatifs à la procédure de suicide assisté ou d’euthanasie. Le vote définitif du projet de loi était lui prévu pour le 18 juin prochain. 

Mais la décision inattendue du Président de la République ce dimanche a réduit à néant cet agenda. « Tout ce que l’on a fait sur le texte sur la fin de vie est anéanti » a amèrement constaté Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée Nationale. « J’appelle dès maintenant les chefs de parti à s’engager sur le sujet dans leur programme et à poursuivre les débats dès l’élection » a commenté pour sa part Jonathan Denis, président de l’Association pour le droit à mourir dans la dignité. 

Bientôt un 7ème ministre de la Santé en seulement deux ans ?

Il reviendra en effet au gouvernement issu des urnes le 7 juillet prochain de reprendre ou non ce projet de loi sur la fin de vie, qui devra repartir de zéro s’agissant de la procédure législative. Rappelons que durant les débats, les députés RN se sont pour la plupart montrés hostiles à la légalisation du suicide assisté et de l’euthanasie tandis que Marine Le Pen s’est toujours dit opposée à la légalisation de l’aide à mourir. Au vu des résultats du RN ce dimanche aux européennes et de leur potentielle victoire aux prochaines élections législatives anticipées, cela n’augure rien de bon pour l’avenir de ce projet de loi. 

D’autres travaux parlementaires intéressant la santé, comme la commission d’enquête sur l’aide sociale à l’enfance ou celle sur l’indemnisation des victimes d’essais nucléaires en Polynésie Française, sont également interrompus. Mais qui dit dissolution dit également nouveau gouvernement. Le ministère de la Santé, qui a connu pas moins de six ministres différents (Bourguignon, Braun, Rousseau, Firmin-Le Bodo, Vautrin, Valletoux) depuis la réélection d’Emmanuel Macron en 2022 pourrait donc bientôt connaitre un septième titulaire différent, surtout si la majorité présidentielle venait à perdre ces élections législatives. 

Une valse des ministres que les syndicats de médecins, libéraux comme hospitaliers, avaient déjà dénoncé lors du dernier remaniement en décembre dernier et qui nuit à l’efficacité du travail réglementaire. De grands chantiers et débats sont pourtant en cours dans le domaine de la santé, comme la refonte du métier d’infirmier, le renforcement des délégations de compétences ou le manque d’attractivité du métier de praticien hospitalier (PH). Que deviendraient ces grandes questions d’organisation de la santé et de santé publique si, par aventure, le Rassemblement National arrivait au pouvoir dans un mois ? Tout comme la France, le monde de la santé entre dans des terres inconnues. 

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