Paris – Pour son premier déplacement en tant que Premier Ministre, Michel Barnier s’est rendu à l’hôpital Necker à Paris.
En choisissant le lieu de son premier déplacement, un nouveau Premier Ministre tente de donner un thème à son nouveau mandat. En janvier dernier, Gabriel Attal avait choisi celui de la sécurité, en se rendant dans un commissariat peu après sa nomination. Devenu jeudi dernier le plus vieux chef du gouvernement de l’histoire de la Vème République, Michel Barnier a lui choisi le thème de la santé.
Ce samedi, le nouveau Premier Ministre s’est ainsi rendu à l’hôpital Necker à Paris et y a rencontré le personnel soignant ainsi que les agents du centre de santé du Samu. Un moyen sans doute de se faire connaitre du monde médical, lui qui, en 50 ans de carrière politique, a rarement été directement confronté à des problématiques dans ce domaine. Selon la formule consacrée, le nouveau locataire de Matignon a promis que « la santé publique sera une priorité, dans les campagnes et dans les villes » de son futur gouvernement.
Michel Barnier ne promet pas de « miracles »
Lors de cette visite, ponctuée notamment par une table ronde avec des soignants, le Premier Ministre a pu sans doute mesurer l’ampleur de la crise qui touche depuis plusieurs années l’hôpital public. Les professionnels de santé présents n’ont en effet pas hésité à exprimer leur ras le bol devant le chef du gouvernement. « On a besoin de moyens mais pas que de moyens financiers, on a besoin de moyens humains » a ainsi expliqué le Dr Elise Neffe, psychiatre à l’Hôtel Dieu de Paris. « Les patients ont énormément de mal à accéder aux soins et ça devient compliqué. Même si ça fait un moment que c'est compliqué mais ça l'est de plus en plus ».
On se souvient que lorsque Gabriel Attal avait rendu visite au CHU de Dijon le 13 janvier dernier au début de son mandat, il avait notamment promis 32 milliards d’euros supplémentaires pour l’hôpital (une promesse qui s’était révélée en grande partie exagérée). Nulle déclaration tonitruante de ce genre pour le discret Michel Barnier, qui n’a fait aucune annonce précise ce samedi lors de sa visite, affirmant qu’il se montrerait plus prolixe sur la question de l’hôpital dans sa déclaration de politique générale début octobre.
Après avoir remercié les professionnels de santé pour leur engagement, l’ancien commissaire européen a d’ailleurs préféré se montrer prudent et calmer les ardeurs des soignants. « Sans faire de miracles, on peut faire des progrès » a-t-il déclaré à sa sortie de l’hôpital. « Il y a des économies à faire, mais on peut faire des progrès dans l’efficacité de la dépense publique » a poursuivi l’ancien ministre, qui a promis de « mieux gérer l’argent public ».
Manque de moyens d’un côté, déficit abyssal de l’autre
Sur le sujet de la santé comme sur d’autres, le chef du gouvernement se trouve en effet pris en étau entre deux réalités irréconciliables. D’un côté, l’hôpital public fait face à un manque cruel de moyens humains et financiers : la Fédération Hospitalière de France (FHF) a rappelé mercredi dernier que le déficit des hôpitaux dépassait les 2 milliards d’euros en 2024 et a demandé au nouveau gouvernement une hausse du budget hospitalier de 8,7 milliards d’euros sur deux ans. De l’autre, les comptes de la Sécurité Sociale sont gravement obérés : alors que la dernière loi de financement de la Sécurité Sociale (LFSS) tablait sur un déficit de 10,5 milliards d’euros en 2024, le directeur général de la CNAM Thomas Fatôme a une nouvelle fois affirmé ce mardi que ce déficit sera en réalité « vraisemblablement plus élevé » et à un « niveau historiquement élevé ».
Les soignants espèrent en tous les cas que Michel Barnier et son futur ministre de la Santé (qui pourrait être nommé dans la semaine) ne cèderont pas aux sirènes de l’austérité. « L'urgent, c'est de faire en sorte qu'on n'ait pas de déficit pour qu'on puisse continuer à embaucher du personnel, avoir des projets, devenir plus moderne, avoir des projets thérapeutiques » affirme le Dr Mathias Wargon, chef du service des urgences de l’hôpital Delafontaine à Saint-Denis. L’urgentiste reconnait qu’une meilleure organisation du travail hospitalier est possible…mais que cela ne peut pas se faire sans une hausse du budget, n’en déplaise à Michel Barnier.