Paris - Après de multiples reports du gouvernement, un projet de loi devant ouvrir l’accès sous certaines conditions au suicide assisté et à l’euthanasie avait commencé à être examiné à l'Assemblée nationale lorsqu'Emmanuel Macron a dissous l'Assemblée nationale le 9 juin. L’adoption était attendue pour le cœur de l’été. En choisissant de faire appel au peuple, le chef de l’Etat a dans le même temps avorté ce texte.
Le député Olivier Falorni, rapporteur du projet de loi a annoncé sur X avoir déposé une nouvelle proposition de loi. Il reprend ce faisant un combat qu’il porte depuis plusieurs années à l'Assemblée nationale. Le parlementaire avait notamment été rapporteur de la mission d'évaluation de la loi dite "Clayes-Leonetti" de 2016 qui avait fait évoluer la prise en charge des personnes en fin de vie, consacrant le refus de l’obstination déraisonnable ou encore l’accès aux soins palliatifs pour tous.
Reprendre les discussions là ou elle se sont arrêtées ? Pas vraiment possible
« Ce texte vise à poursuivre le chemin brutalement interrompu par la dissolution » a indiqué le député MoDem de la Charente-Maritime sur X à propos de sa toute nouvelle proposition de loi. Elle reprend donc intégralement le texte voté par la commission ainsi que tous les amendements adoptés en séance. Au lendemain des élections européennes, l’annonce de la dissolution avait en effet mis fin aux débats qui n’étaient pas allés plus loin que l’article 7. Si le texte avait été adopté en première lecture avant la dissolution, il aurait pu être repris par le Sénat après l’élection de la nouvelle Assemblée, mais tel n’avait pas été le cas.
Au moment d’être abandonné, le projet de loi réservait le suicide assisté aux personnes de plus de 18 ans résidant en France et souffrant d'une « affection grave et incurable qui engage le pronostic vital, en phase avancée ou terminale » et impliquant une souffrance physique ou psychologique insupportable. Seules les personnes aptes à manifester leur volonté de façon libre et éclairée pouvaient en bénéficier. La possibilité qu’un tiers administre la substance létale avait été supprimée.
En reprenant cette dernière version, Olivier Falorni espère empêcher que les travaux de la précédente législature ne soient purement et simplement perdus. Mais en pratique sa proposition devra quoi qu’il arrive faire l’objet d’un nouvel examen législatif depuis le début : examen en commission article par article, puis en séance publique.
Le texte devra ainsi être en premier lieu étudié par la nouvelle commission des affaires sociales qui a à sa tête le député Horizons Paul Christophe (en remplacement de Charlotte Parmentier-Lecocq, Renaissance). Dans les rangs de cette commission on retrouve quelques personnalités influentes : Sandrine Rousseau (EELV), Louis Boyard (LFI), Jérôme Guedj (PS) ou encore Philippe Vigier (MODEM)
Quoi qu’il en soit, la présidence de l'Assemblée « n'a pas encore formellement enregistré le texte » a précisé la chambre basse au Figaro. La soumission des propositions à l'Assemblée requiert effectivement un bref délai d'examen, dont le but principal est d'effectuer une vérification élémentaire de conformité constitutionnelle et de suggérer au député d'éventuelles modifications ou ajustements législatifs. La proposition de loi d'Olivier Falorni est donc toujours introuvable sur le site de l’Assemblée nationale bien que ce dépôt pourrait être validé ces tous prochains jours.
Un texte de consensus ?
L’Assemblée qui se penchera sur le « nouveau » texte est sensiblement différente, mais son barycentre demeure l’ex-majorité présidentielle. Ainsi, dans un post sur X, la journaliste politique Eugénie Bastié analysait qu’il pourrait être l’un des rares à faire consensus, d’autant que Marine Le Pen a annoncé qu’elle laisserait libre cours aux votes personnels sur les questions sociétales.
À gauche, la non-réélection du communiste Pierre Dharréville ne passera pas inaperçue : il était l’un des rares de ce bord politique à s’opposer sur ce sujet. Il reviendra peut-être à Jérôme Guedj, très en pointe sur la question des EHPAD, de reprendre le flambeau de la « dissidence » sur ces bancs.
Dans un entretien récent à Marianne il déclarait ainsi avoir été « inquiété de voir qu’on renonçait à ce droit de bien vieillir en avançant sur l’aide à mourir », en référence à l’abandon par le Gouvernement de la loi « grand âge ». « De fait, si nous ne garantissons pas un accompagnement digne pour les plus âgés, on laisse entendre à ces derniers qu’il est possible d’utiliser le suicide assisté comme une échappatoire à des situations maltraitantes ».