L’alimentation est une source potentielle importante d’exposition à des contaminants chimiques. Parmi eux le méthylmercure, présent dans les poissons, est associé à un risque de troubles du neurodéveloppement qui a justifié des recommandations concernant la consommation de poissons pour les personnes à risque, comme les femmes enceintes et les enfants.
De nombreux nutriments très bénéfiques au neurodéveloppement sont pourtant présents dans les poissons, comme les acides gras polyinsaturés, le sélénium, l’iode et la vitamine D. La diminution de la consommation de poisson prive donc les personnes concernées de ces précieux apports. Il est essentiel d’évaluer plus précisément les risques.
Un modèle pour évaluer les risques et les avantages sur le neuro-développement
C’est ce qu’a entrepris une équipe américaine sur un échantillon de population du Massachusetts ayant l’habitude de consommer du poisson. Les auteurs ont procédé en tenant compte de 2 paramètres : non seulement la consommation de poisson par la mère, mais aussi son degré d’exposition prénatale au mercure (concentration de mercure dans ses cheveux à 10 jours de post partum). Ils ont ensuite analysé l’association entre cette exposition et le neurodéveloppement des enfants, à l’âge de 8 ans (n = 361). Ce dernier était mesuré par des tests de QI, de langage, de mémoire et d’attention.
Réduire la consommation de certains types de poissons
Avec cette approche, il apparaît que la relation entre la consommation de poisson pendant la grossesse et le neurodéveloppement de l’enfant varie selon la teneur moyenne de mercure dans les poissons consommés. En règle générale, consommer du poisson à faible concentration de mercure est bénéfique, alors que celle de poisson à forte concentration de mercure est préjudiciable au neurodéveloppement.
Ces données confirment les estimations antérieures suggérant que les bienfaits de la consommation de poissons sur le neurodéveloppement varient selon les espèces de poissons, dépendant de leur concentration en mercure et en acides gras omega-3, avec un effet-dose. Les auteurs de l’étude donnent pour exemple la consommation de saumon d’élevage pendant la grossesse, qui serait bénéfique au neurodéveloppement de l’enfant, alors que celle d’espadon serait préjudiciable.
Rappelons que le mercure, issu des activités humaines, s’est largement répandu dans les écosystèmes terrestres et marins. Le mercure est assimilé sous la forme de méthylmercure, stable, et qui présente une forte affinité pour les protéines. Il se propage tout au long de la chaîne alimentaire quand une espèce en mange une autre. Ainsi, les grands poissons prédateurs, comme l’espadon et le thon rouge ont une teneur en mercure plus élevée que les plus petits, et doivent être évités. En revanche, l’aiglefin et le saumon d’élevage ont la plus faible teneur en mercure. (Anses)
References
Thurston SW. A Novel Approach to Assessing the Joint Effects of Mercury and Fish Consumption on Neurodevelopment in the New Bedford Cohort. Am J Epidemiol. 2024 Jun 28:kwae149. doi: 10.1093/aje/kwae149.