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Prédire la démence grâce à l’IRM fonctionnelle ?

Une étude publiée récemment dans Nature Mental Health décrit une méthode non invasive qui pourrait permettre de prédire l'apparition d’une démence avec une précision de 80 % jusqu'à 9 ans avant le diagnostic clinique. 

L’altération de la connectivité fonctionnelle cérébrale précède les changements structurels du cerveau et les symptômes de la démence. L'IRM fonctionnelle de repos (rs-fMRI) pourrait servir à identifier une signature du réseau neuronal associée au risque de démence à un stade précoce de la maladie. Si cela se confirmait, cela constituerait une avancée majeure dans le contexte de développement de traitements modificateurs de la maladie, ciblant notamment les plaques bêta amyloïdes.

Une étude cas-témoins imbriquée

L'étude s'appuie sur l'analyse des fluctuations du signal BOLD (Blood Oxygen Level–Dependent) mesuré par l'IRM fonctionnelle, reflétant la connectivité fonctionnelle cérébrale. Les régions du cerveau fréquemment touchées par une altération de la connectivité fonctionnelle dans la maladie d'Alzheimer (MA) appartiennent au réseau du mode par défaut (DMN). Ce réseau regroupe des zones cérébrales qui se connectent et communiquent entre elles lorsqu'un individu est au repos.

Le DMN comprend le cortex préfrontal médial, le cortex cingulaire postérieur ou le precuneus, les cortex pariétaux inférieurs bilatéraux, ainsi que des régions cérébrales supplémentaires telles que les lobes temporaux médians et les pôles temporaux. Ce réseau serait particulièrement vulnérable à la neuropathologie de la MA.

Les chercheurs ont exploité les données de la UK Biobank, une importante base de données biomédicale contenant des informations génétiques et sanitaires provenant d'environ un demi-million de participants volontaires britanniques. Après exclusions liées à la mauvaise qualité des images, l'analyse a porté sur 103 personnes atteintes de démence de toute étiologie parmi les 148 initialement sélectionnées (dont 22 cas de démence diagnostiqués dès l’inclusion et 81 cas diagnostiqués plus tard, pendant un suivi médian de 3,7 années), et 1 030 participants appariés sans démence. Tous les participants ont bénéficié d’une IRM cérébrale à partir de 2014.

Une précision de prédiction supérieure à 80 %

L'étude a démontré la capacité du modèle à différencier les schémas de connectivité cérébrale entre les personnes qui développeront une démence et celles qui n'en développeront pas, avec une précision de 82 % jusqu'à 9 ans avant le diagnostic officiel. Dans le cadre de cette étude, la « dysconnectivité » a permis de prédire à la fois l'incidence future de la démence (AUC = 0,82) et le délai de diagnostic (R = 0,53). Cette approche basée sur la connectivité effective s'avère bien plus prédictive que les tests de mémoire ou les mesures structurelles du cerveau.

Ces résultats ouvrent la voie à une détection et un potentiel traitement précoce de la démence. Un outil de prédiction par rs-fMRI pourrait également servir à sélectionner des participants à haut risque pour tester des traitements candidats.

Les auteurs constatent certaines limites à la rs-fMRI en tant qu’outil de diagnostic et de pronostic. Elle est coûteuse et le signal peut être dégradé en présence de mouvements excessifs de la tête. Cela se reflète dans le taux d’exclusion élevé de leur propre analyse (au moins un quart des participants). D’autres travaux sont encore nécessaires, en particulier intégrant des biomarqueurs biologiques de la MA. A terme, ce nouveau test pourrait avoir une valeur de dépistage populationnel, comparable au dépistage du cancer du côlon. Mais, dans un futur certainement lointain…


References

Ereira, S., Waters, S., Razi, A. et al. Early detection of dementia with default-mode network effective connectivity. Nat. Mental Health (2024). https://doi.org/10.1038/s44220-024-00259-5


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