L’exposition indirecte à un traumatisme peut générer des symptômes associés au trouble de stress post-traumatique, tels que ceux qui peuvent suivre lors de l’exposition directe à l’événement. Ces symptômes sont l'évitement, l'hyperactivité et l'intrusion. Le stress traumatique secondaire (STS) se développe lorsque l’on entend parler des expériences traumatiques vécues par une autre personne.
Le niveau de stress traumatique secondaire chez les infirmières élevé dans de nombreux pays
Des recherches ont démontré que le STS est fréquent chez les infirmières avec une prévalence allant de 25 % chez les infirmières médico-légales à 78 % chez les infirmières en soins palliatifs. Une étude menée en Écosse auprès d’infirmières travaillant dans les services des urgences a révélé que 75 % d’entre elles présentaient au moins un symptôme du STS.
Parmi les infirmières irlandaises travaillant dans les services médicaux d'urgence, 64 % répondaient aux critères du STS. De manière similaire, 52 % des infirmières d'urgence jordaniennes ont signalé un STS élevé. Selon d'autres études, les symptômes du STS sont fréquents chez les infirmières en soins intensifs et en oncologie.
Les symptômes du STS incluent : difficultés dans la résolution de problèmes et les prises de décision, une concentration altérée, des troubles du sommeil, des pensées intrusives sur les patients, de l'irritabilité, de la crainte pour l'avenir et une diminution du niveau d'activité. Par conséquent, la productivité des infirmières au travail peut être affectée par un STS, entraînant des préoccupations en matière de sécurité pour les patients et pour les autres professionnels de la santé.
Une étude transversale auprès d’infirmières croates
L'objectif de cette étude transversale était d'explorer la fréquence du STS parmi les infirmières inscrites à un programme universitaire Croate en Sciences Infirmières. Les données ont été recueillies à l'aide de l'échelle de stress traumatique secondaire (STSS) et de deux items de la version brève de la qualité de vie de l'Organisation mondiale de la santé (QV-OMS).
L'étude a inclus 151 étudiants, avec un taux de réponse de 70 %. Le score moyen de STS était de 38, indiquant une souffrance modérée chez les étudiants. La moitié des participantes répondaient aux critères du STS. Les infirmières en activité inscrites en master présentaient des scores de STS inférieurs à celles inscrites en licence (t = 4,14 ; df = 149 ; p < 0,01).
Le niveau de STS était négativement corrélé à l'évaluation de la qualité de vie des participants (r = -0,392 ; p < 0,01) et à leur satisfaction vis-à-vis de leur santé (r = -0,387 ; p < 0,01). De plus, une corrélation positive significative a été observée entre l'évaluation subjective de la qualité de vie et la satisfaction à l’égard de la santé personnelle (r = 0,432 ; p < 0,01).
Aucune association significative n'a été trouvée entre le niveau de STS et le sexe (r = -0,094) ou les années d'expérience en soins infirmiers (r = -0,069). Le niveau de STS variait en fonction du lieu de travail des participants, de leurs années d'expérience dans ce lieu et de leurs horaires de travail. Les niveaux les plus élevés de STS étaient observés chez les infirmières travaillant dans le service de médecine interne, celles ayant 10 à 14 ans d'expérience dans le service actuel et celles travaillant en plages horaires figées.
Des résultats à prendre en compte, malgré certaines limites
Cette étude présente certaines limitations, notamment l'utilisation d'un échantillonnage pratique qui peut restreindre la généralisation des résultats. Les participants se sont volontairement inscrits en fonction de leur disponibilité, introduisant ainsi une potentielle différence significative entre les répondants et les non-répondants. Malgré un taux de réponse élevé (70 %), le risque de biais de non-réponse reste présent. De plus, l'échantillon limité aux infirmières d'une seule université en Croatie pourrait ne pas représenter adéquatement la diversité de la population infirmière, tant au niveau national qu'international.
Il est également souligné que, en raison de la nature délicate du sujet, les participants pourraient avoir minimisé ou exagéré leurs expériences, bien que l'anonymat de l'étude ait cherché à atténuer ce risque.
Parmi les autres limitations, on note l'absence de calcul de la taille de l'échantillon, la nature transversale de l'étude qui limite la compréhension du développement des symptômes de traumatisme secondaire, et l'absence de contrôle pour les antécédents de troubles mentaux, malgré leur influence connue sur le risque de STS.
Dans cette étude, plus de la moitié des infirmières en activité inscrites à des études universitaires présentaient un STS d'intensité modérée. Le STS était associé négativement à la perception de la qualité de vie des participants et à leur satisfaction à l’égard de leur santé. Des interventions préventives et d'atténuation pourraient contribuer à alléger le fardeau du STS chez les infirmières.
References
Civljak M, Stivic I, Puljak L. Secondary traumatic stress in working nurses studying part time in a bachelor or Master's nursing program in Croatia: a cross-sectional study. BMC Nurs. 2024 Jan 5;23(1):22. doi: 10.1186/s12912-023-01691-1